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Continuer la lectureSNCF : l’oubli fâcheux qui empêche l’Élysée de nommer Jean Castex dès maintenant
Emmanuel Macron compte toujours nommer son ancien premier ministre à la tête de la compagnie ferroviaire. Mais des embûches découvertes dernièrement l’obligent à temporiser.

L’Élysée s’est emmêlé les pinceaux. Le projet de nommer son champion comme PDG de la SNCF ne pourra se concrétiser dès la fin juin, comme Emmanuel Macron en avait l’intention. Après consultations, il est apparu que le choix de Jean Castex pour diriger la compagnie ferroviaire nationale rencontrait un nouvel obstacle. L’exécutif, s’il confirme sa décision, devra encore patienter jusqu’à la fin octobre pour l’officialiser. En cause, selon nos informations, le mandat dont Jean Castex a eu la charge, durant quelques semaines à peine, en tant que président de l’Afit, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France. À la suite de la démission de son gouvernement le 16 mai 2022, l’ex-Premier ministre a en effet succédé à ce poste à Christophe Béchu devenu, le 4 juillet, ministre de la transition écologique et de la Cohésion des territoires dans le gouvernement Borne. Entre sa prise de fonction à l’Afit, par un décret signé le 17 août 2022, et son départ pour rejoindre la RATP, entériné par un autre décret, daté du 9 novembre 2022, il n’y sera resté que moins de trois mois.
« Le délai est pourtant suffisant pour caractériser un conflit d’intérêts avec une potentielle arrivée à la SNCF, au regard des règles de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), précise une source au fait du dossier. L’Élysée a découvert le problème dernièrement. » Il a été partagé avec l’entourage du président de la RATP. Le souci vient du fait que l’Afit est un établissement public qui collecte et distribue les financements de l’État dans les infrastructures routières, fluviales, portuaires mais surtout ferroviaires. Le principal bénéficiaire est SNCF Réseau, la filiale du groupe qui gère les 28 000 km de lignes ferroviaires en France, avec 1,5 milliard d’euros de soutien prévu en 2025 sur un budget total de 3,7 milliards.
« Pour avoir l’aval de la HATVP, il faudra attendre la date anniversaire de la période de trois ans pendant laquelle subsiste le conflit d’intérêts avec la fonction précédente, explique un proche du dossier. Pour la fonction de chef du gouvernement, cela s’est éteint le 16 mai dernier. » Pour celle de l’Afit, les avis divergent concernant la date de référence : ce pourrait être celle du décret du 9 novembre 2022 ou, plutôt, celle du conseil d’administration du 19 octobre quand Jean Castex a informé les administrateurs de son possible départ à la RATP. Une prise de fonction à la SNCF interviendrait alors à la fin de l’année, après avoir obtenu la validation de l’Assemblée nationale et du Sénat.
Ce délai n’est, étrangement, pas pour déplaire à l’actuel PDG de la régie parisienne de transports qui entend laisser une maison en bon ordre. Fin juin, quatre lots de bus à Paris et en Petite couronne seront attribués par Île-de-France Mobilités (IDFM) et, à la rentrée, 2 autres, les plus importants, dans Paris intra muros. « Pour l’instant, le président a réussi à conserver trois lots de bus sur six : s’il en récupère au final sept ou huit sur les douze, ce sera un succès, estime-t-on dans son entourage. En dessous, ce sera un résultat mitigé. » Autre défi pour Jean Castex : boucler pour le conseil d’administration d’IDFM du 10 juillet prochain les négociations sur le contrat 2025-2029, comme l’a noté le Monde. Le volet financier est presque finalisé entre les deux parties : selon nos informations, un accord sur les indicateurs de performance et les grandes masses financières a été trouvé fin mai avec Valérie Pécresse, la présidente d’IDFM. Jean Castex aurait notamment obtenu une augmentation de la contribution de la Région aux finances, permettant de réduire les pertes de la partie opérateur de transports de la RATP, qui atteignaient 150 millions d’euros en 2024. « Il reste encore quelques détails qui ont leur importance à régler, prévient une source au fait des négociations. On y est presque. »
À la SNCF, où l’on attend un nouveau patron depuis la fin des Jeux olympiques et paralympiques de Paris, le 8 septembre dernier, on devra donc patienter encore quelques mois. « Jean-Pierre Farandou est atteint cette année par la limite d’âge de 68 ans fixée pour les PDG de la SNCF : un changement dans la gouvernance doit intervenir lors de l’assemblée générale qui valide les comptes 2024 », rappelle une source gouvernementale. La date n’est pas encore arrêtée mais elle doit intervenir fin juin. « Le plus probable est que l’intérim de Jean-Pierre Farandou soit prolongé avec une dissociation de fonction, ce qui repousse la limite d’âge de deux ans pour un président qui ne serait plus également directeur général ». En interne, beaucoup parient que Laurent Trevisani, l’actuel directeur général délégué du groupe SNCF, sera désigné pour prendre l’intérim de la direction générale pendant quelques semaines. Mais le groupe pourrait aussi choisir un administrateur indépendant.
Toutefois, une petite musique commence à monter, mettant en doute l’arrivée future de Jean Castex à la tête de la SNCF. « Plus l’attente se prolonge, plus son arrivée semble incertaine, juge un observateur extérieur. Le temps est un adversaire pour lui. » L’Agence des participations de l’État, comme d’autres services de Bercy, aurait émis des doutes sur sa gestion à la tête du groupe RATP, dont le résultat était toujours déficitaire en 2024 de 26 millions d’euros. Par ailleurs, Emmanuel Macron pourrait s’accommoder d’un tel retard. « Le président de la République souhaite de toute façon conserver Jean Castex libre le plus longtemps possible, observe un consultant de l’exécutif. Le nommer une nouvelle fois à Matignon est une des options envisagées au Château au cas où une motion de censure sur le budget, dont les grandes orientations seront dévoilées début juillet, ferait tomber le gouvernement de François Bayrou… »