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Continuer la lectureLa Moulaga : la propriétaire de la villa du clip réclame plus de 100 millions d’euros
Pour tourner la vidéo de leur tube, Heuss l’Enfoiré et Jul avaient loué une magnifique villa dans le Var. Les maîtres des lieux réclament leur part du gâteau.

« Donnez, do-do-donnez, donnez-moi d’la moulaga… » Fin 2019, le rappeur Heuss l’Enfoiré dévoile La Moulaga, un titre à la mélodie entêtante, en duo avec Jul, l’un des rappeurs français les plus en vue. Comme la « moula » dont il est dérivé, ce mot d’argot signifie « argent » ou « drogue ». Très vite, la chanson devient un phénomène : sur Spotify, La Moulaga est même le titre le plus streamé du rappeur, avec plus de 280 millions d’écoutes. Le clip tourné pour l’occasion fait rapidement un carton : il comptabilise à ce jour plus de 210 millions de vues sur YouTube. Mais, selon nos informations, cette vidéo est aujourd’hui au cœur d’une âpre bataille judiciaire.
La raison ? La magnifique villa du Castellet (Var) qui a servi lors du tournage du clip. On la découvre d’abord grâce à des images prises depuis un drone. Puis on voit les deux rappeurs entourés de nombreux invités en train de chanter au bord de la piscine et dans la maison. Problème, les propriétaires qui avaient loué le bien assurent ne jamais avoir été mis au courant de ce tournage. Si le dossier a mis du temps avant d’arriver au tribunal - une première assignation n’a pas eu d’effet en raison d’un problème d’enrôlement - ils sont aujourd’hui bien décidés à obtenir réparation. « La plupart du temps, mes clients vivent dans cette maison. Elle n’a pas vocation à servir pour des tournages. La famille n’était absolument pas au courant », nous assure leur avocat Jérôme Janin. Et d’ajouter que depuis les faits, la famille est importunée par des passants qui ont reconnu la villa dans la vidéo. Ainsi, la mère de famille, en son nom, a assigné en justice Google France, la maison mère de YouTube, Homelly, la plateforme de location, et Midi Midi production, le label qui a produit la chanson. La SCI propriétaire de la maison est également intervenue dans la procédure par la suite.

Les requérants demandent le retrait du clip de Youtube, et 106 775 672 euros à Midi Midi production et Homelly en réparation du préjudice. Un montant qui correspond au nombre de vues enregistrées sur YouTube à la date de la première assignation. Les responsables d’Homelly sont accusés de négligence. « Ils disent qu’ils n’étaient pas au courant. Donc on se demande comment toutes les équipes sont rentrées dans la maison pour tourner un clip, ironise Me Janin. Le contrat de gestion et les contrats de location de Homelly ne sont pas clairs. » Ce montant sera amené à évoluer lors des prochaines échéances judiciaires : « Il va falloir l’actualiser avec le nombre de vue actuel, et quantifier le préjudice personnel de chaque associé de la SCI mais aussi celui de la société en elle-même », explique Me Janin.
Le Tribunal judiciaire de Toulon a rendu une première décision le 9 septembre dernier. Consultée par l’Informé, elle ne porte pas sur le fond, mais sur des points de procédure précis. Ainsi, les propriétaires avaient dans un premier temps assigné Google France, qu’ils prenaient pour l’hébergeur de la vidéo. Mais, selon les juges, c’est la filiale irlandaise du géant du net qu’il fallait viser : le tribunal a donc jugé irrecevable l’action des propriétaires de la maison sur ce point. « Nous avons depuis fait traduire l’assignation pour viser Google Ireland, réel hébergeur de la vidéo », indique l’avocat de la famille à l’Informé. La cour a également ordonné à Homelly de fournir à ses clients les contrats litigieux. Ce qui, selon nos informations, n’a pas encore été fait. « L’objectif est de trouver un accord et de signer un protocole transactionnel, indique Me Janin à l’Informé. Mais, à ce jour, aucune proposition n’a été faite. » Une prochaine audience de mise en état aura lieu d’ici la fin de l’année.
Contactés, les conseils de Homelly et Google France n’ont pas répondu à nos sollicitations, pas plus que les rappeurs Jul et Heuss l’Enfoiré ni le réalisateur du clip William Thomas.