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Continuer la lectureMappy : le rival français de Google Maps au bord de la sortie de route
Racheté par la RATP en 2020, l’outil de cartographie et de calcul d’itinéraires accumule les pertes. Pour s’en sortir, il aimerait pouvoir commercialiser des titres de transport.

Virage difficile pour Mappy. Le service de cartographie et de calcul d’itinéraires, logé dans la filiale RATP Smart Systems (RSS) depuis près de cinq ans, traverse une très mauvaise passe. Entre 2023 et 2024, le chiffre d’affaires de la société dirigée par Florence Leveel a été quasiment divisé par deux. Il est passé de 10,1 à 5,6 millions d’euros et ses pertes se sont lourdement creusées à 3,4 millions d’euros a appris l’Informé. RSS, sa maison mère, a donc dû être recapitalisée de 20 millions d’euros l’an dernier. Et, en janvier, elle a accueilli Frédéric Trojani, un nouveau président éphémère parti fin juin remplacé par Rémy Redeuilh… Les déboires de Mappy sont aussi un crève-cœur pour Jean Castex, le PDG de la RATP qui devrait être appelé à la tête de la SNCF fin octobre. Il bataille sur tous les fronts pour réduire les foyers de pertes afin de redresser les comptes de la régie parisienne. Non sans résultats. En 2024, elle a dégagé pour la première fois un bénéfice net, à hauteur de 204 millions d’euros (contre une perte de 109 millions en 2023) grâce à une chasse aux coûts efficace. La RATP s’est ainsi désengagée d’un projet de taxis volants, s’est séparée de l’activité (déficitaire) des bus à Londres, a renégocié le contrat de transports en Toscane et a réduit la voilure sur les investissements dans la tech. Mappy suivra-t-il la même route ?
Tout n’est pas encore joué. Certes, le contexte est compliqué. La faute à la concurrence des géants américains dont les applis phares, Google Maps et Apple Plans, sont installées par défaut sur des dizaines de millions de smartphones en France. Mais c’est surtout la fin du partenariat avec le groupe Solocal (ex-PagesJaunes) et ancien propriétaire de Mappy, qui lui a porté un coup dur. La société de petites annonces locales, reprise en main par Maurice Lévy l’an dernier, a décidé de ne plus intégrer ce service à PagesJaunes.fr. Elle l’a remplacé par Here (société créée par Nokia et détenue aujourd’hui par BMW, Daimler et Audi).
La RATP tente aujourd’hui de récupérer la perte de chiffre d’affaires liée à ce client important mais cela prendra du temps. Car les moyens de monétiser son service de mobilité gratuit sont limités. Avec 12,8 millions de visiteurs uniques par mois en juillet, la publicité ne suffit pas. L’autre source de revenus provient des partenaires. Mappy n’offre pas seulement le traditionnel calcul d’itinéraires, le choix de son mode de transport (bus, métro, vélo, trottinette…) ou le calcul de son impact environnemental. Elle propose aussi la réservation d’hôtels et de restaurants ou encore une sélection de commerces de proximité vers lesquels elle renvoie du trafic en encaissant une commission au passage.
Pas de quoi couvrir les coûts de fonctionnement. Mappy cherche donc une troisième ressource en proposant la vente de billets de transport dématérialisés, le Navigo Liberté +. Il s’agit aujourd’hui de la seule formule d’abonnement disponible sur tous les téléphones mobiles : destinée aux voyageurs occasionnels, elle permet une tarification des trajets à l’unité et une facturation mensuelle. Tout comme Bonjour RATP, l’autre application du groupe. Seulement voilà, Île-de-France Mobilités propose déjà ce service depuis le 25 juin dernier sur sa propre application et ne compte pas laisser des concurrents faire de même.
La RATP a saisi l’Autorité de régulation des transports (ART) pour régler ce différend, afin de pouvoir vendre ces titres avec une marge. L’ART lui a donné raison le 31 juillet sur les mesures conservatoires mais une décision définitive, qui clarifiera les conditions, doit être rendue en fin d’année ou au plus tard en début d’année prochaine. Très attendue, elle aura des conséquences sur l’avenir de tous les acteurs de la filière billettique de transport. Et pour Mappy, la seule solution pour éviter… la sortie de route.
Contactée, la RATP n’a pas souhaité faire de commentaire dans l’attente de la décision de l’ART.