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Continuer la lectureL’Agence française anticorruption diligente un contrôle chez CMA CGM
Dans le cadre des audits qu’elle lance chaque année, l’autorité indépendante a choisi de passer au crible la pertinence des mesures anticorruption de l’armateur marseillais.

Spécialisées dans la prévention et la détection de la corruption, les équipes de l’Agence française anticorruption (AFA) ont jeté leur dévolu sur CMA CGM. Selon nos informations, l’autorité indépendante a diligenté ces derniers mois un contrôle chez l’armateur marseillais, présidé par Rodolphe Saadé. L’agence, dirigée depuis juillet 2023 par Isabelle Jegouzo, l’ex-conseillère Europe et international du ministre de la justice Éric Dupond-Moretti, peut entreprendre deux types de contrôle. Ceux qu’elle lance à son initiative, afin de vérifier la qualité et l’efficacité des mesures anticorruption déployées par les acteurs privés (entreprises, fondations…) ou publics (administration, collectivité locale…). Et ceux mis en place après une mise en cause pénale, comme les contrôles d’exécution des mesures judiciaires dans le cadre des conventions judiciaires d’intérêt public - CJIP - et les peines de programmes de mise en conformité. Cette sorte de « plaider-coupable » introduit dans la loi Sapin 2 permet à une entreprise accusée de corruption qui reconnaît les faits et collabore avec la justice de ne pas être poursuivie.
Contrôle d’initiative
Dans le cas de CMA-CGM, c’est un contrôle d’initiative que le gendarme anticorruption a lancé. L’agence précise à l’Informé ne pas « s’exprimer sur les contrôles en cours », mais son dernier rapport annuel, paru le 19 juillet dernier, lève un peu le voile sur sa méthodologie pour lutter contre les atteintes à la probité. Sur les 37 contrôles qu’elle a diligentés en 2023, 25 sont des audits « d’initiative ». Un peu moins de la moitié l’ont été dans des entreprises d’au moins 500 salariés et plus de 100 millions d’euros de chiffres d’affaires, appartenant à des secteurs d’activité exposés à des risques de corruption ou qui se sont vu notifier des avertissements les années précédentes. La quinzaine d’autres visites surprises a concerné des acteurs publics…
Les contrôles et les échanges entre l’autorité et l’entreprise peuvent s’étaler sur plusieurs mois. À l’issue, l’armateur devrait se voir remettre par l’AFA un rapport sur la qualité de son dispositif et une liste de recommandations. En cas de manquements, le groupe se verrait alors adresser un avertissement ou être envoyé devant la commission des sanctions de l’agence. Ce contrôle, sur lequel CMA CGM fait savoir à l’Informé « qu’il n’y a pas davantage d’informations » à communiquer, survient dans un contexte de fort turnover dans les équipes de sa direction juridique. En deux ans, le groupe a changé deux fois de pilote : après Béatrice Bihr, arrivée en février 2023 et partie l’été suivant, c’est Caroline Le Masne de Chermont, qui a décidé de quitter le navire à la rentrée prochaine.
Des signalements à la hausse
Sept ans après sa création, l’Agence française anticorruption (AFA) a réussi à s’imposer comme un acteur incontournable de la prévention et de la détection de la corruption ou du trafic d’influence dans la sphère économique, auprès des acteurs publics et privés. Un ancrage en phase avec la perception qu’ont les Français du sujet : selon le dernier rapport annuel de l’AFA, 69 % d’entre eux considèrent que la corruption est largement répandue dans le pays et 26 % disent y avoir été personnellement confrontés…
Le rôle de l’organisme a d’ailleurs été élargi en octobre 2022 à celui d’autorité externe chargée du recueil des signalements, à la suite de la loi améliorant la protection des lanceurs d’alerte. Cette nouvelle prérogative a eu un effet direct sur le nombre d’alertes qui lui sont arrivées : en 2023, l’agence a reçu 435 signalements, soit 40 % de plus que l’an passé. « Nombre d’entre eux ont été transmis une fois expertisés aux autorités judiciaires ou administratives compétentes », indique le rapport de l’autorité.