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Continuer la lectureComment l’Élysée surveille son image au jour le jour
L’exécutif renouvelle un appel d’offres pour obtenir des synthèses exigeantes des articles de presse sur l’action du président et de son gouvernement en France et à l’international. Un sujet crucial.

Au 55, rue du Faubourg Saint-Honoré, on est très vigilant sur l’image renvoyée par Emmanuel Macron et le gouvernement. L’Élysée a en effet lancé début septembre un appel d’offres divisé en deux lots pour trouver des prestataires chargés d’élaborer des notes de synthèse de la couverture médiatique des domaines liés à l’activité du président et à l’action gouvernementale. Une décision qui prend une nouvelle ampleur compte tenu de la démission du Premier Ministre ce lundi et de la chute de son gouvernement.
La direction de la communication de la présidence de la République (Dircom) espère ainsi obtenir dans le lot 1 des synthèses analytiques de la presse nationale, régionale, et même internationale, sur un rythme quotidien ou hebdomadaire. Le lot 2 prévoit la mise à disposition d’une base de données d’articles de presse et de biographies. Le coût de l’ensemble de ces prestations est estimé à 85 000 euros HT par an (65 000 euros pour le lot 1 et 20 000 euros pour le lot 2). La durée de l’accord-cadre est d’un an renouvelable au maximum trois fois. Soit un marché d’un montant total de 340 000 euros HT sur quatre ans. « Cet appel d’offres permet aux équipes presse, veille et archives de la Présidence de la République de disposer d’une base de données d’articles de presse et de biographies et de synthèses afin d’avoir un aperçu global de l’actualité parmi les titres de presse les plus lus en France », a précisé l’Élysée à l’Informé. Ces prestations, qui reposent sur des bons de commande émis en fonction de la densité de l’actualité ont commencé après l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, et sont donc en phase de renouvellement.

Le descriptif de cet appel d’offres consulté par l’Informé est riche d’enseignement sur les attentes et les exigences de l’Élysée. Le prestataire retenu devra ainsi être en mesure d’envoyer par email, entre 6 h 00 et 6 h 30 du matin du lundi au samedi, la synthèse analytique de la presse nationale, qui couvre 25 quotidiens et hebdomadaires. Le dimanche et les jours fériés, l’envoi devra être effectué entre 7 et 8 h 00. Cette synthèse qui ne devra pas dépasser 5 pages, « doit permettre de montrer l’évolution des sujets tout au long de la journée en indiquant la tonalité constatée dans leur traitement par les médias, tout en mettant en valeur les informations importantes, en citant les interlocuteurs qui s’expriment et reprenant le cas échéant leurs citations les plus notables », indique l’appel d’offres.
D’autres synthèses quotidiennes pourront le cas échéant être commandées sur le même principe pour 19 titres de la presse régionale. La présentation sera ici découpée en cinq sous-parties. Les quatre premières sont consacrées à la présidence de la République, à l’action gouvernementale, aux actualités régionales dominantes et aux actualités internationales dominantes. La dernière, intitulée « En bref », traitera de sujets d’actualité générale, moins médiatisés. Son intérêt ? Évaluer l’opinion générale des médias, et détecter les signaux faibles, l’un des grands enjeux des communicants. Cette synthèse « régionale » d’une longueur maximale de 3 pages devra être envoyée entre 9 h 30 et 10 h 15. On ne saurait être plus précis…
Une nouveauté dans cet appel d’offres : une synthèse de la presse étrangère pourra être demandée chaque jour ou chaque semaine selon les besoins. À cet égard, 32 titres devront être épluchés (voir liste ci-dessous). L’objectif est bien sûr d’analyser l’image du président et de la France à l’international, avec deux focus : la guerre russo-ukrainienne et le conflit au Proche-Orient.

L’exécutif a sérieusement bordé sa demande. Tout d’abord, il choisira les mots-clés et les thématiques à suivre. Ensuite, la sélection des articles devra « s’appuyer sur la richesse du contenu, la qualité des signatures, les interventions majeures du Président de la République, des membres du Gouvernement, l’actualité gouvernementale et les grands faits marquants de l’actualité ». Et gare aux fake news ! Le recours à l’IA est proscrit. Le choix des articles et la rédaction de la synthèse devront être réalisés par un agent humain « et non via l’aide totale ou partielle d’une intelligence artificielle ». Enfin, la qualité et la régularité doivent être au rendez-vous. En cas de non-respect de l’horaire d’envoi, prévoir 50 euros par quart d’heure de retard, dans un délai de 3 heures. La pénalité sera de 100 euros si un article important est oublié. Et en cas de mauvaise présentation de la synthèse, la facturation mensuelle (calculée en fonction du nombre de commandes) sera réduite de 10 % si aucune correction n’est apportée après deux courriels d’avertissement.
Actuellement, la liste de diffusion compte 40 destinataires, dont les principaux sont le commandement militaire, le département de veille et d’analyse, le service dialogue citoyen, le secrétariat général, le directeur de cabinet et les membres du cabinet.
Les synthèses à réaliser n’incluent pas le suivi des sites d’informations pure player, mais uniquement les quotidiens et les hebdomadaires. Pour autant, l’Élysée veut avoir l’œil sur tout ce qui s’écrit, y compris sur le Net. Le deuxième lot de l’appel d’offres prévoit ainsi la mise à disposition d’une base de données d’articles de presse et de biographies. Elle doit permettre d’avoir accès aux articles de la presse française quotidienne et périodique (nationale comme régionale), à la presse spécialisée, aux articles de presse en ligne et pure player, à la presse étrangère, aux dépêches d’agence, et aux biographies de personnalités issues, entre autres, de la Société générale de Presse (Bulletin Quotidien, Correspondance de la presse, etc.), du Who’s Who et du Trombinoscope.
Toutes ces tâches ne prévoient cependant pas la réalisation de revues de presse traditionnelles, c’est-à-dire la compilation et l’envoi d’articles complets. Selon nos informations, la présidence de la République a mis fin à cette mission depuis la fin de l’année 2024.
Les 76 journaux concernés par les synthèses analytiques de l’Élysée
25 quotidiens et hebdomadaires pour la presse dite nationale :
20 Minutes, Challenges, Charlie Hebdo, L’Express, L’Humanité, L’Obs, L’Opinion, La Croix, La Tribune, Le Canard Enchaîné, Le Figaro, Le Figaro Magazine, Le Journal du Dimanche, Le Monde, Le Parisien - Aujourd’hui en France, Le Parisien Dimanche, Le Point, Les Échos, Libération, M. Le magazine du Monde, Marianne, Paris Match, Valeurs actuelles, La Tribune Dimanche, JD News.
19 quotidiens pour la presse régionale :
L’Est Républicain, L’Union, La Dépêche du midi, La Montagne, La Nouvelle République, La Provence, La Voix du Nord, L’Alsace, Le Courrier de l’Ouest, Le Courrier Picard, Le Dauphiné Libéré, Le Progrès, Le Républicain Lorrain, Le Télégramme, Les Dernières Nouvelles d’Alsace, Midi Libre, Nice-Matin, Ouest-France, Sud-Ouest.
32 quotidiens et hebdomadaires pour la presse internationale :
The Telegraph, The Times, The Economist, The Guardian, The Independent (Royaume-Uni), Frankfurter Allgemeine Zeitung, Die Welt, Der Tagesspiegel, Süddeutsche Zeitung (Allemagne), L’Echo, La Libre, Le Temps (Belgique), Il Sole, Il Corriere Della Sera, La Repubblica, La Stampa (Italie), El País, La Vanguardia, El Mundo, La Razon (Espagne), The Wall Street Journal, The Washington Post, The New York Times (États-Unis), South China Morning Post, The Straits Times (Asie), The Times of India (Inde), O Globo, Folha de Sao Paulo (Brésil), Le Matin (Maroc), El Watan (Algérie), Haaretz, The Times of Israël (Israël).