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Continuer la lectureAir France : la promotion de l’ancien président du SNPL annulée
La compagnie avait désigné un ponte du syndicat majoritaire chez les pilotes de ligne à un poste de direction. De quoi provoquer une bronca en interne.

Mélange des genres. Une tempête interne s’est levée chez Air France quand la direction a annoncé aux représentants du personnel, mi-septembre, que son choix pour le poste de « safety manager » et directeur de la sécurité des vols pour les opérations aériennes allait se porter sur Guillaume Gestas, un ancien président du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) chez Air France, l’organisation ultra-majoritaire chez le personnel navigant. Les qualités professionnelles de ce commandant de bord - instructeur sur A330 et A350, présent depuis plus de vingt ans dans la compagnie -, ne sont bien sûr pas en cause : ce sont ses responsabilités syndicales passées et… présentes qui posent problème. Car l’ancien dirigeant du SNPL de 2018 à 2022 conservait, au moment de l’annonce de sa promotion, un mandat d’élu au comité social et économique (CSE) d’Air France. La nomination n’était pas encore officiellement entérinée par la direction qu’elle provoquait déjà une déflagration chez les autres syndicats maison (Alter, Spaf) et même au sein du SNPL. « La décision a provoqué une levée de boucliers surtout de la part des adhérents du syndicat, ajoute un pilote de ligne. Le recrutement à un poste de direction d’un ancien éminent membre du bureau portait le risque de trop fortement discréditer l’action syndicale. »
Face à la fronde dénonçant « une erreur manifeste de la compagnie », la direction d’Air France a préféré annuler son projet de nomination avant qu’il ne devienne officiel, selon nos informations. L’actuel « safety manager » d’Air France, Emmanuel Rollier, un commandant sur A330 et A350 avec plus de vingt ans de maison, restera finalement en poste jusqu’à la nomination d’un successeur. Celui-ci devrait être issu du processus de sélection interne déjà initié. Pour la compagnie, l’objectif est de désigner au plus tôt un titulaire à ce poste stratégique. « Le safety manager joue un rôle de pivot entre la direction de la sécurité des vols et celle des opérations aériennes, indique un commandant de bord. Les incidents de vols lui sont remontés et, s’il ne peut prendre de sanctions, il peut informer les cadres-pilotes pour que des actions concrètes soient prises dans les opérations aériennes. » Il est aussi un des rouages essentiels du dialogue social : il rencontre les syndicats de pilotes pour leur présenter les projets de la direction. « La situation était devenue compliquée avec Emmanuel Rollier, les relations avec les représentants de pilotes sont devenues assez rugueuses », estime un pilote d’Air France.
Le revirement de la direction de la compagnie permettrait en tout cas de calmer l’ambiance en interne. Car l’actuel bureau du SNPL, son organe exécutif, est déjà critiqué par certains pilotes pour une proximité jugée « trop grande » avec la direction de la compagnie. Lors de son arrivée aux manettes en 2018, l’équipe de Guillaume Gestas était d’ailleurs jugée plus conciliante que celle qui l’a précédée (menée par l’intransigeant Philippe Evain). Elle s’était vite démarquée de l’intersyndicale qui réunissait les pilotes avec les hôtesses, les stewards et les personnels au sol, pour se concentrer sur les seules revendications des pilotes.
Aujourd’hui, les débats sont vifs, y compris au sein du syndicat. Il y a un an, le conseil d’administration du SNPL Air France avait rejeté, comme l’avait révélé l’Informé, une proposition de la compagnie sur la compensation d’heures de vol garanties mais non effectuées, même si le texte avait reçu au préalable l’aval du bureau du syndicat. Les responsables avaient alors été contraints de relancer les négociations. Précédemment, la nomination d’un ancien secrétaire général du SNPL, Vincent Demantké, au poste de directeur des relations sociales Pilotes, avait déjà fait bondir les autres syndicats. « La haute direction et ses conseillers voient sans doute des avantages à ’engager’ ainsi le SNPL et peut-être conditionner ses représentants nouvellement élus », estimait le Spaf dans un tract.