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Continuer la lectureCopie privée : dernier round avant la possible taxation des ordinateurs
Après les smartphones et les tablettes, les ayants droit de la culture ont obtenu une étude d’usage qui ouvre la voie à l’application de la redevance sur les PC.

Après les smartphones, les tablettes, les clés USB, les disques durs externes ou encore les box, est-ce bientôt le tour des ordinateurs ? Comme nous révélions en mai dernier, les défenseurs de la « taxe » copie privée plaident pour une nouvelle extension de cette redevance perçue par les industries culturelles pour compenser la possibilité ouverte aux personnes physiques de réaliser des copies de leurs œuvres sans leur autorisation. Selon nos informations, l’application de cette taxe sur les ordinateurs se précise : lors d’un vote organisé le 6 octobre au sein de l’instance administrative chargée de fixer les taux de perception, les 12 ayants droit ont voté en bloc en faveur du lancement d’une étude d’usages pour ce nouveau segment. Le sondage doit être réalisé d’ici l’été 2024 : si les consommateurs déclarent réaliser des copies d’œuvres protégées (films, musiques, images, textes) sur leurs ordinateurs, la commission copie privée pourra ensuite voter une redevance spécifique.
Au-delà de la copie classique sur le disque dur du PC, les ayants droit estiment que de nombreux Français partagent des œuvres avec leurs proches via les plateformes de stockage en ligne comme Google Drive ou Dropbox. Or un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne de mars 2022 a jugé que le cloud entrait bien dans le périmètre de la taxe copie privée . Dans le projet de cahier des clauses techniques particulières, pièce maîtresse du marché que le ministère de la Culture s’apprête à lancer et consulté par l’Informé, il est spécifié que le sondage à venir concernera tous les ordinateurs, peu importe leur système d’exploitation (Windows, MacOS, distributions Linux), que ces appareils soient fixes ou portables, neufs ou même reconditionnés. Un avant-goût du champ de perception.
Concomitamment, des études d’usages seront lancées pour deux catégories de produits déjà taxés, ce sont les smartphones et les tablettes (14 euros HT au-delà de 64 Go de capacité, pour l’une ou l’autre de ces catégories). Une mise à jour réclamée par l’Inspection générale des finances et l’inspection générale des affaires culturelles puisque les taux actuels sont obsolètes : ils ont été déterminés en 2018 avec une méthodologie définie en 2012.
À l’occasion de la même réunion, les 12 ayants droit se sont cette fois vertement opposés à une autre étude, proposée par la Fédération Française des Télécom (FFT), présente aussi autour de la table parmi les 6 sièges attribués aux industriels des supports. Les opérateurs télécoms, qui vendent des téléphones portables à leurs abonnés, espéraient faire financer par la commission une analyse de faisabilité technique consistant en l’installation d’un logiciel sur les smartphones de 2 000 personnes afin de mesurer, avec leur accord, le volume de copies sur une période déterminée. La solution aurait permis d’analyser et peut-être même objectiver précisément le volume des fichiers qui ne relèvent pas de la copie privée sur un Android ou un iPhone, à savoir les copies personnelles (les photos de ses enfants, les vidéos de vacances), les copies professionnelles, les films ou musiques « pirates », ou encore les téléchargements de films depuis Netflix ou de musique Spotify.

Les ayants droit ont dit « niet » considérant en substance qu’un tel mécanisme fragiliserait les études d’usages existantes et serait, en outre, trop intrusif pour la vie privée des sondés. Déjà majoritaires, en raison d’une commission qui souffrait ce même jour de plusieurs absences chez les six représentants des consommateurs, leurs 12 voix ont bénéficié du vote favorable d’Indecosa-CGT, association très à l’écoute des intérêts de la culture.
Dans un communiqué, le collège des industriels a regretté « la persistance d’une gouvernance déséquilibrée au profit des ayants droit », estimant que l’analyse technique, qu’ils défendaient, aurait pourtant permis de conforter les résultats des études d’usages traditionnelles face à l’évolution des pratiques de consommation des œuvres culturelles vers le streaming.