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Continuer la lecturePrêt-à-porter : le plan de Ba&sh pour sortir de l’ornière
La marque aux 300 points de vente doit passer par une procédure de sauvegarde accélérée pour avaliser sa restructuration financière et éviter l’impasse de trésorerie.

Le bout du tunnel n’est peut-être plus très loin pour Ba&sh. Fragilisée par une forte baisse de sa rentabilité entre 2022 et 2023 (-35%), l’enseigne de mode aux 300 magasins n’est pas passée loin de la catastrophe. La chaîne a du arracher une bouffée d’air à ses créanciers en ouvrant des négociations en mai 2024 sous la protection du tribunal de commerce de Paris - dans le cadre d’un mandat ad hoc, puis d’une conciliation dès juillet. Des discussions fructueuses puisqu’un accord de principe autour d’un plan de restructuration financière a pu être trouvé. Reste maintenant à l’entériner formellement, dans le cadre d’une procédure de sauvegarde financière accélérée*, comme l’a révélée le site Fashion Network. L’Informé s’est procuré les détails du plan envisagé : il prévoit des efforts significatifs de la part des actionnaires, en particulier de ses fondateurs et, d’un degré moindre, de la holding HLD (majoritaire), pour soutenir la trésorerie. En contrepartie, les banques et les fonds qui détiennent la dette mise en place pour l’opération de LBO de 2022 consentent à des reports d’échéance.
Dans le cas de Ba&sh, c’est précisément Muse, la société de tête du groupe, qui a été placée en sauvegarde financière accélérée. La papesse des administrateurs judiciaires, Hélène Bourbouloux, est ici à la manœuvre après avoir assumé le rôle de conciliatrice. Créanciers et actionnaires devront s’exprimer en faveur ou non du plan selon le système dit de classes de parties affectées qui, en gros, répartit les prêteurs par groupes en fonction des types de dette octroyée (à hauteur des deux tiers), une majorité de classes devant ensuite approuver le plan. Mais l’issue du vote semble assez certaine : le schéma négocié lors de la conciliation jouit déjà d’un large soutien, puisque les créanciers sont 83 % à l’approuver - une seule banque s’y est opposée : le Crédit Agricole d’Île-de-France. Le plan table sur une progressive hausse de l’Ebitda d’ici à 2027, ce qui le ferait atteindre les 29 millions d’euros. À titre de comparaison, ce résultat ressortait à 37 millions d’euros en 2022 pour 310 millions de chiffre d’affaires. Il était descendu à 23 millions en 2023 (pour un niveau de ventes quasi inchangé).
Concrètement, les actionnaires acceptent de remettre au pot 15 millions d’euros. Les plus gros contributeurs seront les fondatrices Barbara Boccara et Sharon Krief (qui ont donné les premières lettres de leur prénom respectif à la marque) ainsi que l’entrepreneur Dan Arrouas, lui aussi présent depuis la première heure - ils se partagent tous les trois 30 % du capital actuellement. De son côté, HLD, va limiter sa réinjection de cash à 3 millions d’euros. Mais l’effort des actionnaires ne s’arrêtera pas à un apport d’argent frais, puisqu’ils vont également convertir en actions les 55 millions d’euros d’obligations qu’ils avaient mises en place dans le montage du LBO d’il y a trois ans.
De leurs côtés, les banques accepteront d’attendre un peu leur dû : les dettes concernées par le plan, qui s’élèvent 110 millions, ne seront remboursées que d’ici fin 2028. Le report concerne 40 millions de prêts LBO amortissables et 10 millions d’euros de crédits renouvelables contractés auprès de BNP Paribas, du Crédit Agricole d’Île-de-France et du CIC : leur maturité actuelle avait été fixée à mai 2027. Le reste de la dette, soit 60 millions d’euros dus à des fonds de dette d’Eurazeo, Tikehau et Allianz, correspond à un prêt remboursable à leur terme - ces fameuses « tranches B » incontournables dans les opérations de LBO. Le report d’échéance se limite ici à seulement 7 mois, puisque la maturité court aujourd’hui à mai 2028.
Un autre acteur - et pas des moindres - devra lui aussi faire un léger effort, le fonds L Catterton de la galaxie Bernard Arnault. Ce dernier est un ancien propriétaire de Ba&Sh : il avait cédé la majorité du capital de l’enseigne à HLD en 2022. À sa sortie, il avait bénéficié d’un crédit-vendeur de 10 millions d’euros - sorte de facilité de paiement (assortie d’intérêt) permettant à un acheteur de payer plus tard une petite partie du prix d’acquisition. Selon le plan qui sera soumis au vote, le crédit vendeur sera converti en actions de préférence. Ces titres donneront la possibilité à L Catterton de percevoir une partie des produits de cession lorsque Ba&Sh sera revendu dans quelques années (probablement en 2027 ou 2028).
*Comme son nom le suggère, la procédure de sauvegarde financière accélérée a vocation à se solder rapidement, et ne porte que sur les dettes financières d’une entreprise. Il doit valider un plan de redressement déjà élaboré précédemment dans le cadre d’une conciliation.