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Continuer la lectureLes insolents résultats de Primark… en attendant la loi fast fashion
Alors qu’elle pourrait pâtir de prochaines mesures législatives, l’enseigne continue son développement rapide en France. Les chiffres exclusifs de l’Informé.

L’actualité est chargée pour Primark France. Ce mardi 26 mars, l’enseigne conviait la presse à une grande conférence pour présenter sa contribution « économique et sociale » , mais aussi « environnementale et sociétale », dix ans après son arrivée dans l’Hexagone. Une opération séduction dont le timing ne doit rien au hasard : le parlement discute actuellement d’une proposition de loi visant à « réduire l’impact environnemental de l’industrie textile ». Un texte aussi surnommé loi anti fast fashion.
Lors de son point presse, Primark a égrené quelques chiffres flatteurs : le nombre d’ouvertures prévu ces prochaines années (5 d’ici fin 2025), les investissements réalisés en 2023 (100 millions d’euros), ou encore les emplois créés en magasin… et au-delà (un poste dans un magasin générerait jusqu’à 0,7 emploi supplémentaire dans le département d’implantation). En revanche, l’enseigne a préféré rester très discrète sur ses performances financières… Elles ont pourtant de quoi faire rêver nombre de réseaux du secteur. L’Informé a eu accès aux comptes de l’entreprise textile d’origine irlandaise, et selon nos informations, la chaîne a enregistré un chiffre d’affaires en hausse de 16,3 % en France lors de son exercice 2023 (clos fin août), à 890 millions d’euros. Le résultat d’exploitation a atteint 2,9 % à 25,9 millions, en légère hausse sur un an, le résultat net étant lui stable, à 12,9 millions d’euros. Ce dynamisme tranche avec l’état du marché textile. Selon les données de l’institut Français de la mode, en dépit de l’inflation, le bilan de l’année 2023 enregistre un recul de 1,3 % en valeur par rapport à 2022. « Et les chiffres d’affaires générés en 2023 restent en moyenne inférieurs de 5,6 % à ceux de 2019. »

À rebours des tendances, Primark ouvre et embauche à tour de bras. Sur le dernier exercice, son parc est passé de 20 à 24 magasins et ses effectifs de 5500 à 6124. Avec trois nouvelles ouvertures recensées ces derniers mois, elle compte même désormais 27 adresses et 7000 employés. Un 28e point de vente ouvrira à Tours d’ici la fin de l’année, et quatre autres unités sont prévues en 2025.
Un nuage noir pourrait toutefois venir assombrir ses perspectives : la loi sur la fast fashion, validée en première lecture par l’Assemblée prévoit entre autres un « malus » environnemental renforcé. Les critères seront basés sur les volumes produits et la vitesse de renouvellement des collections, avec des seuils qui n’ont pas encore été fixés. Un système de bonus – et surtout de malus - pourrait progressivement atteindre jusqu’à 10 euros par article en 2030 (plafonné à la moitié du prix de vente). Tout doit encore être largement discuté - à ce stade, la définition de la fast fashion n’est pas encore claire et va faire l’objet d’un lobbying intense- mais le dispositif pourrait chambouler complètement le modèle économique de certains acteurs. À écouter la patronne de Primark en France, Christine Loizy, sa marque ne serait pas toutefois pas « concernée » par le terme de fast fashion. Elle a plutôt présenté sa chaine comme une enseigne familiale, qui n’a pas recours à la vente en ligne et ne fait pas de publicité. Parmi les autres arguments bien calibrés ? Le faible nombre de collections par an, par ailleurs commandées 9 mois à l’avance et transportées par bateau. Un discours pour se différencier des acteurs comme le site Shein notamment, accusés de tous les maux avec leurs prix cassés et leurs articles de faible qualité renouvelés sans cesse. Contactée pour commenter ces chiffres, l’entreprise ne nous avait pas répondu à l’heure de la publication.