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Continuer la lectureL’impossible reprise de Causette
Plus de trois mois après l’annonce de la reprise du magazine par Mélody Madar, les difficultés s’amoncellent et le chantier est toujours au point mort.

Mauvaise nouvelle pour les lectrices nostalgiques de Causette : elles ne sont pas près de retrouver leur mensuel préféré. Le 15 octobre dernier, selon nos informations, la Cour d’appel de Paris a arrêté l’exécution provisoire de l’ordonnance du tribunal de commerce qui attribuait des actifs du titre à Mélody Madar. En clair, la décision de la juridiction est suspendue, le temps d’être confirmée ou infirmée lors d’une prochaine audience qui aura lieu en fin d’année. Pour tout comprendre, retour en juin dernier : moins de huit mois après l’arrêt de la parution papier du titre et le début de sa bascule sur le web, son propriétaire, le groupe Hildegarde, décidait alors d’arrêter de le soutenir financièrement et déposait le bilan. Comme nous le révélions, le mensuel féministe a donc été placé en liquidation judiciaire, au grand dam de ses salariées qui espéraient un simple redressement et ont été finalement licenciées.
S’est alors ouverte une période où de potentiels acheteurs ont pu se positionner pour récupérer les actifs de la marque. Si plusieurs acteurs se sont un temps intéressés au dossier, comme le groupe SOS, Prisma Media (Vivendi) ou encore la Fondation des femmes, seulement deux ont fini par déposer une offre : le fondateur du titre Grégory Lassus-Debat, qui en proposait un euro symbolique, et Mélody Madar, créatrice du média Les Éclaireuses, qui en proposait 119 000 euros en tout. Mais restait alors un problème de taille : comme nous l’expliquions dans un second article, les marques associées au titre (Causette, On nous prend pour des quiches, et Française d’origine contrôlable), sont toujours à ce jour détenues par le président d’Hildegarde Reginald de Guillebon, qui entendait soit les vendre à l’acquéreuse, soit lui proposer une licence d’exploitation.
Dans un mail envoyé la veille du délibéré du tribunal aux mandataires, le conseil de Madar a évacué la question, précisant que sa cliente n’avait « pas vocation à utiliser le nom de la marque Causette » et pourrait donc en changer. Consulté par l’Informé, le courriel indique également que l’offre portait impérativement sur les fichiers clients abonnés, mais aussi la reprise de tous les réseaux sociaux de Causette ainsi que du site. Finalement, le 11 juillet, le tribunal de commerce a acté l’acquisition par Madar des « actifs incorporels [de Causette] à savoir, le fichier clients, l’ensemble des réseaux sociaux, le site internet » et a mentionné qu’elle ferait « son affaire personnelle du changement de nom ».
La décision a fait bondir le président d’Hildegarde Reginald de Guillebon. Estimant que la candidate avait « illégalement changé son offre via un mail post-procédure » et que le mandataire judiciaire s’était « laissé influencer », ce dernier a fait appel de l’ordonnance, comme l’a révélé Challenges. « On marche sur la tête. On lui a donné des actifs qui n’étaient pas, au départ, mis en jeu », tempête-t-il auprès de l’Informé. Le 15 octobre dernier, la cour d’appel de Paris a donc rendu son premier avis sur l’affaire. Considérant que la cession portait en effet sur « des éléments non visés dans le cahier des charges et non visés dans l’offre », la juridiction a suspendu la décision du tribunal de commerce. « Madame Madar me fait perdre du temps et de l’argent », conclut le patron de presse, envisageant plusieurs scénarios pour la suite : « Soit elle rachète la marque, soit elle accepte le contrat de licence proposé, soit elle se retire et nous relançons un appel d’offres. Elle peut aussi aller jusqu’au bout, mais nous verrons ce que le juge décidera ». L’audience qui déterminera (enfin) le futur de Causette aura lieu en fin d’année.
Interrogée par l’Informé, l’ex-rédactrice en chef de Causette Sarah Gandillot indique avoir « du mal à comprendre » pourquoi son ancien patron « met autant de bâtons dans les roues à Mélody Madar ». « Toute l’affaire est dure à encaisser. Nous ne savons pas comment les choses se seraient passées si la reprise s’était faite, mais au moins c’était une option. Aujourd’hui, on n’en a plus », poursuit la journaliste, qui ne s’avoue tout de même pas vaincue. « Une partie de l’équipe serait encore partante pour relancer ce projet, on aime ce titre et on trouve qu’il n’a pas d’équivalent ailleurs. » Le site web de Causette n’est aujourd’hui plus disponible.