L'abonnement à l'Informé est à usage individuel
Un autre appareil utilise actuellement votre compte
Continuer la lectureSNCF : la chasse pour trouver un nouveau PDG est lancée
L’Agence des participations de l’État vient de choisir le cabinet qui conduira le processus de désignation du successeur de Jean-Pierre Farandou. Le passage de relais doit s’effectuer en mai, lors de l’assemblée générale du groupe public.

« Il y a comme un temps suspendu chez SNCF, confie un de ses dirigeants. Rien ne bouge en attendant la décision de l’État sur la gouvernance. » Si Aéroports de Paris a vu la procédure de nomination d’un nouveau PDG s’achever tout récemment (ce mercredi 12 février) avec la désignation de Philippe Pascal, la SNCF doit prendre son mal en patience. Au printemps, le gouvernement avait choisi de ne pas renouveler les dirigeants de ces deux entreprises publiques, Augustin de Romanet et Jean-Pierre Farandou. Il avait toutefois « demandé » à chacun d’eux d’assurer « la continuité de ses fonctions » afin de « garantir la bonne organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 », selon des communiqués similaires. Depuis, en partie du fait de l’instabilité gouvernementale, la compagnie ferroviaire aux 279 000 salariés reste dans l’attente du choix de l’exécutif. Aucune décision n’a été prise hormis l’assurance - non officielle - donnée à l’actuel PDG qu’il serait maintenu en fonction jusqu’à l’assemblée générale de mai qui validera les comptes de l’année 2024. « Les intérims d’un an sont un vrai problème : les dizaines de milliers de salariés de cette entreprise sont laissées dans l’attente de savoir quels seront les choix structurants pour son avenir, par exemple en ce qui concerne l’intelligence artificielle », regrette un proche du dossier.
Ce n’est que mi-janvier, une fois entériné le choix de l’exécutif pour ADP, que l’Agence des participations de l’État (APE), actionnaire unique de la SNCF, s’est penchée sur le dossier. L’organisme dépendant de Bercy vient de confier un mandat au cabinet de chasseurs de têtes français Eric Salmon & Partners, selon nos informations. La boutique, dirigée à Paris par Albérique Peyredieu-Jabalot, a d’ores et déjà lancé le chantier avec la définition du profil recherché et l’organisation de premiers rendez-vous avec des cibles. Mais ce processus de désignation mené dans l’ombre agace : les ministres se plaignent de ne pas être dans la boucle, de même que le conseil d’administration de la SNCF. Une lutte d’influence se joue pour éviter que l’APE ne gère le sujet en solo. « Alexis Zajdenweber ne laisse rien paraître des initiatives qu’il prend, se plaint un administrateur. Il n’y a pas de problème avec un État actionnaire à 100 % qui décide, mais ce serait bien que le processus soit clair et transparent. »

Surprise : la chasse concerne un PDG, alors que l’hypothèse privilégiée cet été était de confier une présidence non-exécutive à Jean-Pierre Farandou et de lui adjoindre un directeur général, sur le modèle de la transition entre Anne-Marie Idrac et Guillaume Pepy. Une solution jugée préférable compte tenu de la difficulté de trouver un profil capable de gérer les enjeux industriels, les négociations sociales dures et le maintien d’une trajectoire financière rentable. « Le poste est rude, très technique et très politique, les soubresauts sont fréquents et la rémunération faible au regard de celles de patrons d’entreprises privées équivalentes, reconnaît un conseiller de l’exécutif. Mais la commande de l’État se porte finalement sur un seul capitaine pour piloter le paquebot SNCF. »
« Jean-Pierre s’y est préparé en laissant entendre ces derniers jours qu’il n’exigerait pas d’être maintenu deux ans de plus à la présidence, confie un proche. Bien sûr, il restera si le gouvernement le lui demande, car il a le sens du service public. Mais il a envie de faire autre chose. Il réfléchit à devenir consultant ou à s’engager dans des causes qui lui sont chères. » Pour lui succéder, plusieurs noms circulent déjà. Le patron de RTE, Xavier Piechaczyk, mène toujours campagne, avec le soutien de l’Élysée. Il a d’ailleurs eu un entretien le 12 février dernier avec le ministre chargé des transports, Philippe Tabarot. Toujours cité, Jean Castex a démenti, une nouvelle fois, toute candidature dans le Figaro. « Il a des velléités de se présenter pour l’élection présidentielle en 2027, tout le monde le sait, et prendre un poste si exposé nuirait certainement à sa campagne, juge un expert de la sphère publique. Et le Parlement verrait, en outre, d’un mauvais œil un départ pour la SNCF six mois après son renouvellement à la RATP. » Sa garde à vue, ce jeudi 13 février par les gendarmes de la section de recherche de Montpellier, pour détournement de fonds publics lors de son mandat à la tête de la communauté de communes de Conflent Canigo (Pyrénées-Orientales), rend encore un peu plus incertain un éventuel transfert vers le groupe ferroviaire.
Yann Leriche, un ancien de Transdev qui a pris la direction générale de Getlink, est une autre personnalité pressentie sur ce dossier. En interne, la patronne de Gares & Connexions, Marlène Dolveck, promue DG adjointe du groupe SNCF par Jean-Pierre Farandou, est attendue. Mais les regards se tournent désormais vers Marie-Ange Debon, la présidente du directoire de la filiale de transports publics Keolis, également à la tête de l’Union des Transports Publics et Ferroviaires (UTPF), le syndicat patronal du secteur. « C’est la même filière Keolis que Jean-Pierre Farandou, remarque un conseiller ministériel. Elle a pour elle d’avoir redressé l’activité de manière efficace et d’avoir déjà l’expérience des enjeux internationaux comme des négociations sociales serrées. » La période pourrait d’ailleurs être favorable aux dirigeantes, le gouvernement se sachant attendu sur sa stratégie de féminisation des directions d’entreprises publiques. « Sur les quatre postes ouverts, on sait déjà qu’ADP reviendra à un homme (Philippe Pascal, ndlr) et que deux hommes se disputent la Caisse des dépôts (Olivier Sichel et Emmanuel Moulin, ndlr) : reste donc l’opportunité de nommer au moins une femme à la tête de la SNCF et à La Poste, note un ancien ministre. Ne pas le faire serait une faute politique pour le président de la République. »
Contactés, l’APE et Eric Salmon & Partners n’ont pas souhaité commenter nos informations.