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Médias - Culture

Des créateurs s’étonnent d’être repris dans le livre de Michel Denisot sans leur accord

Dans son dernier ouvrage « On peut rire de tout, sauf en mangeant de la semoule », Michel Denisot a compilé des contenus humoristiques piochés sur le web. Il a cependant omis de demander l’aval de certains des créateurs à l’origine de ces contenus.

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Foc Kan WireImage / Getty Images

Depuis quelques semaines, il est partout. La mine joviale, Michel Denisot fait la tournée des plateaux TV et radios pour faire la promotion de son nouveau livre, On peut rire de tout, sauf en mangeant de la semoule. Paru aux éditions Plon le 9 mars dernier, l’ouvrage est un agrégat coloré de bons mots et autres mèmes, ces photos accompagnées d’une légende humoristique qui les détourne. Dès la (courte) préface, l’animateur historique du Grand Journal est clair : il n’est pas l’auteur de ces blagues, et son livre est un « hommage aux talents multiples » qu’il suit et qui le suivent sur les réseaux sociaux.

« Un impair a été commis » 

Invité de La Bande originale sur France Inter le 17 mars dernier, Michel Denisot a reconnu cet incident. Dans son entourage, on assume qu’un « impair a été commis » et qu’une personne n’a en effet pas été contactée. L’incident serait donc isolé et résolu : la personne aurait même proposé à Michel Denisot de continuer à repartager ses contenus à l’avenir. Aussi, « aucune personne d’autre n’a contacté ni Plon ni Michel Denisot » à ce sujet, assure-t-on. L’Informé a pourtant échangé avec d’autres internautes qui ont retrouvé leur pseudonyme dans les crédits de l’ouvrage, à l’instar du créateur de la page @ComplotsFaciles : « Je sais qu’il reprend sur ses réseaux mes créations ou celles que je partage de temps en temps, et il ne m’a jamais cité. Cette fois, je suis cité mais on ne m’a rien demandé », explique l’internaute, tout en ajoutant que la situation ne le dérange pas. D’autant plus que la publication en question est une traduction d’un mème anglais et non une de ses trouvailles.

Un autre utilisateur de Twitter, @_Zake, interrogé raconte la même expérience, que bien des membres de sa communauté ont aussi vécue selon ses dires. « Il n’y a eu aucune collaboration, j’ai été alerté de la reprise de ma blague par quelqu’un sur Twitter qui avait acheté le livre, » relate-t-il. Et d’ajouter « On sait que nos tweets ne nous appartiennent pas, et que sur le plan légal on n’a rien à dire… mais ça ne lui coûtait rien de faire les choses de manière correcte et de nous prévenir. »

Complexe traçabilité des créations du web

Rien à dire sur le plan légal ? Bien au contraire ! Les créations partagées sur Twitter sont complètement éligibles au droit d’auteur rappelle Valérie-Laure Benabou, professeure de droit spécialiste de la propriété intellectuelle et du droit du numérique contactée par l’Informé. « Ce n’est pas parce que l’on met à disposition son œuvre sur une plateforme que l’on perd le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire son utilisation publique », rappelle l’experte. Avec deux cas particuliers toutefois : « la courte citation ou la parodie ». Mais selon cette professionnelle, le livre de Denisot ne relèverait d’aucune de ces exceptions. « Le fait de faire un livre entier pour faire rire ne justifie pas à mon avis qu’on reprenne des œuvres d’autrui et qu’on en tire un profit : il n’y a ici pas de volonté de parodier… on veut juste faire rire ! »

Concrètement, les auteurs des créations présentées dans l’ouvrage sans leur accord pourraient alors agir en contrefaçon, et réclamer des royalties sur les revenus perçus grâce aux ventes du livre. Un scénario peu probable compte tenu de la difficulté à tracer des créations du web : « Pour un mème, par exemple, il est ardu de remonter la chaîne, reconnaît Valérie-Laure Benabou. Il faut déterminer si la photo utilisée appartient bien au créateur du mème, s’il est le premier à avoir fait la blague en question… » De plus, « la création en question doit présenter une véritable empreinte de la personnalité de son auteur ». De nombreux internautes peuvent ainsi être découragés par l’ampleur de la procédure et les frais afférents.

Reste la question des droits d’auteur perçus par la légende du PAF grâce à cet ouvrage. Selon Edistat, On peut rire de tout, sauf en mangeant de la semoule s’est vendu à près de 1 300 exemplaires entre le 9 et le 12 mars dernier : un bon démarrage, pour un ouvrage tiré à 8 000 copies. En partant du postulat que Michel Denisot percevrait 10 % de droits d’auteur sur chaque exemplaire à 17,90 euros vendus (un pourcentage courant dans le métier), on peut estimer qu’il aurait d’ores et déjà perçu environ 2 300 euros. Naturellement, la diffusion de l’ouvrage devrait gonfler dans les semaines qui viennent, et les revenus avec. Interrogé sur ce montant, l’entourage de Michel Denisot indique que l’animateur historique du Grand Journal a décidé de reverser l’ensemble de ses droits d’auteurs aux Restos du Cœur.

Contacté, Michel Denisot n’avait pas répondu à nos sollicitations à la parution de cet article.

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