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Continuer la lectureCe que prévoit le plan de continuation du groupe Avec, sans Bernard Bensaid
Le tribunal de commerce de Bobigny étudiera ce mercredi le projet présenté par les nouveaux dirigeants du géant du médico-social. Sans son fondateur poussé à partir.

Stop ou encore pour le groupe Avec ? Ce mercredi 4 juin, le Tribunal de Commerce de Bobigny doit examiner le plan de redressement présenté par la direction de cette galaxie d’une centaine d’entités qui emploient près de 10 000 personnes, principalement dans les secteurs médico-social (Ehpad, aides à domicile…) et sanitaires (cliniques notamment), dont la holding Avec SA est en redressement judiciaire depuis mars 2024. Le président Patrick François et son directeur général Adam Oubuih, le duo qui a pris les commandes depuis la mise en retrait du fondateur Bernard Bensaid, y travaillent depuis le mois de mars.
L’idée est de proposer aux magistrats la continuité de toutes les activités qui n’ont pas déjà été cédées, grâce à une injection de fonds conséquente – une trentaine de millions d’euros – assurée par Bernard Bensaid. Celui-ci accepterait de renoncer à tous droits et dividendes pendant la durée du plan. Il a fini par céder à la pression des deux nouveaux dirigeants d’Avec mais aussi à celle de Bercy et du Comité interministériel aux restructurations d’entreprises (Ciri). Les acteurs publics - notamment le fisc et l’Urssaf - sont en effet les principaux créanciers de la société Avec SA, à hauteur de 40 millions d’euros sur 76 millions de dettes. Le montant exact de l’ardoise pour tout le groupe n’était, lui, pas encore complètement établi à quelques jours de la présentation du plan de redressement.
Pour réaliser la tentative de sauvetage sans que Bernard Bensaid ait son mot à dire, une fiducie de gestion doit être mise en place : ce type de contrat doit permettre aux nouveaux dirigeants de gérer le groupe en acceptant les injections de fonds de la famille Bensaid, mais en leur ôtant tout pouvoir. « Pour dénouer la situation, il fallait une solution à la mesure, commente Adam Oubouih auprès de l’Informé. La défiance était telle vis-à-vis de l’actionnaire historique que le dispositif est exceptionnel ». « Le tribunal a demandé une fiducie pour que soit mis en œuvre le plan de continuation et, comme je suis bon élève, je me plie à cette décision », commente l’intéressé. Bernard Bensaid n’aurait de toute façon pas pu faire autrement. Car selon nos informations, il a été condamné à six ans d’interdiction de gestion le 26 mai dernier par le Tribunal de commerce de Bobigny suite à la liquidation de la société DG. De ce fait, il est obligé de lâcher les commandes de toutes les sociétés dont il est gérant. Contacté, Bernard Bensaid n’a pas souhaité commenter ce jugement auprès de l’Informé.
L’ancien tout-puissant patron a tout de même du mal à lâcher les rênes. Lui, son épouse Frédérique et leur fils Jacob n’ont démissionné du conseil d’administration d’Avec SA, la structure de tête du groupe, que le 19 mai dernier, au terme d’une réunion particulièrement houleuse et passionnée. Bernard Bensaid a notamment exigé qu’Avec lui rembourse immédiatement 300 000 euros de frais qu’il avait avancés via sa holding personnelle. Avant de renoncer. Il a aussi obtenu un job de « conseiller du président », moyennant une rémunération brute annuelle de 60 000 euros. « Monsieur Patrick François indique que la nouvelle gouvernance souhaite s’associer à l’expertise de Monsieur Bernard Bensaid, afin de s’assurer de la transmission des savoirs », indique le compte rendu du conseil d’administration. Il précise que cette assistance est limitée dans le temps à la préparation des projets de plan de redressement du groupe Avec. Il souligne que le président peut mettre fin à cette mission à tout moment. Bernard Bensaid n’est donc pas tout à fait sorti du paysage, ce qui n’aidera pas à restaurer la confiance avec des salariés devenus très méfiants.
Autre grain de sable : si Bernard Bensaid a accepté le principe de la fiducie, les discussions ont achoppé sur sa longévité. Selon nos informations, il souhaitait la voir limitée à quatre ans, une durée qu’il s’est refusé à nous confirmer, se contentant d’évoquer des « désaccords sur les modalités de mise en œuvre, comme dans toute négociation ». Elle sera finalement de dix ans, comme le réclamaient impérativement Patrick François et Adam Oubuih et Bercy, une période étalonnée sur la durée d’un plan de redressement. Un temps relativement long, en regard de l’âge de Patrick François qui vient de fêter ses 72 ans.
Pour les 30 millions de fonds à apporter par la famille Bensaid, la partie est également ardue, car il faut trouver des acquéreurs aux actifs qu’ils souhaitent céder. Le gros de la somme doit normalement venir de la cession des murs et des terrains de la clinique Bonneveine à Marseille. Mais la vente est encore loin d’être faite et se fera en tout cas à des tarifs bien en deçà des attentes de son propriétaire. « J’ai reçu le dossier une dizaine de fois ces quinze derniers mois », indique à l’Informé un professionnel de l’immobilier qui souhaite garder l’anonymat. « Il y a effectivement des droits à construire, mais aussi des contraintes liées au plan local d’urbanisme et à l’inondabilité », ajoute le spécialiste. Les acheteurs potentiels ne sont pas non plus emballés par un actif occupé par une clinique en redressement judiciaire. Notre expert parie plutôt sur une vente à 20 millions qu’à 30. Le complément serait alors complété par des cessions, déjà réalisées, d’autres actifs détenus par Bernard Bensaid et ses proches.