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Continuer la lectureLe blogueur Aqababe bientôt poursuivi pour escroquerie
Soutenus par le Collectif d’aide aux victimes d’influenceurs (Avi), plusieurs clients du pro des réseaux sociaux s’apprêtent à déposer plainte contre lui. Ils l’accusent de les avoir abusés financièrement.

« Sur mon site et mes réseaux sociaux, tu as l’opportunité de t’afficher auprès d’une audience dynamique et moderne. Ensemble, on peut créer une collaboration qui déchire ! » Du haut de ses 26 ans, Aniss Zitouni, alias Aqababe, semble avoir le sens du business autant que du gossip. Sur sa plateforme « xoxoaqababe.com », l’influenceur partage à ses fans toute sorte d’infos sur les vedettes d’internet et de la téléréalité. Rupture d’un couple star, détail croustillant sur l’Île de la tentation ou indiscrétion sur une gloire d’Insta, rien n’échappe au pro des réseaux… qui propose ensuite à des marques de profiter de sa visibilité pour promouvoir des produits. Avec succès : L’Oréal, Mixa ou encore Amazon Prime, tous se laissent tenter par un encart publicitaire sur son site.

Sur Instagram ou Snapchat, Aqababe fait également la promotion de sociétés, parfois plus confidentielles. Mais selon nos informations, plusieurs déplorent une bien mauvaise expérience. Soutenues par le Collectif d’aide aux victimes d’Influenceurs (Avi), connu pour avoir accompagné des particuliers contre les controversés Dylan Thiry, Poupette Kenza ou encore Marc Blata, plusieurs clients du blogueur star s’apprêtent même à déposer plainte pour escroquerie, abus de confiance et pratiques commerciales trompeuses auprès du Procureur de la République de Paris, après une tentative de conciliation avortée. Tous accusent l’influenceur de ne pas avoir respecté ses engagements et, pire encore, de ne jamais les avoir remboursés.
Andréa*, par exemple, raconte à l’Informé s’être rapprochée courant 2021 de Zitouni, qu’elle considérait à ce moment-là comme la « référence des blogueurs ». À la tête d’une petite société de cosmétiques, la jeune femme souhaite alors faire la promotion de ses produits auprès de l’audience importante d’Aqababe, et explique avoir conclu avec lui un contrat : pour 500 euros, elle obtiendra une mise en avant sur son compte Instagram. « Il m’a tout de suite mise en confiance, on se sent à l’aise avec lui », se souvient l’entrepreneuse. Mais finalement, selon elle, l’influenceur ne publiera jamais la publicité promise, malgré les multiples relances de sa cliente. « Je suis actuellement dans le train […], désolé j’ai passé une nuit épuisante […], je suis sincèrement débordé… » : dans ces messages (voir ci-dessous), le jeune homme multiplie les explications pour justifier le non-respect de son engagement. Finalement, il aurait promis à Andréa un remboursement… qui ne serait jamais arrivé. Deux autres entrepreneurs portent plainte pour des faits similaires, pour un préjudice d’environ 800 euros.

Cas un peu particulier à leurs côtés, celui de Jamila*. En proie à des difficultés financières liées au non-versement par son ex-mari d’une pension alimentaire, cette jeune femme raconte s’être tournée vers Aqababe afin qu’il lui conseille un détective privé pour localiser son ex-compagnon. Le jeune homme est en effet connu pour retrouver la trace de personnalités dans le monde entier, et publier les nombreuses vidéos volées que lui envoient ses abonnés. Pour 265 euros, la star des réseaux aurait ainsi proposé à Jamila de repérer lui-même en 48 heures seulement le véhicule de son mari, afin d’obtenir sa plaque d’immatriculation : « Grâce à mes taupes et des contacts que je vais missionner pour le suivre dans l’Île-de-France », assure-t-il dans des messages récupérés par le collectif Avi. Et d’ajouter : « J’ai des taupes partout, impôts, fisc, police partout ». La jeune femme verse alors la somme : mais là encore, à en croire les messages recueillis, la prestation n’est jamais effectuée, et Jamila ne sera jamais remboursée. « Avec le recul, je me sens idiote, confie la victime. Mais ça m’a beaucoup touché, car il savait que j’étais en difficulté et s’est montré très empathique avec moi… et ses prix étaient moins chers qu’un vrai détective. »

Au-delà du préjudice financier, les deux victimes interrogées par l’Informé peinent à supporter l’aura dont bénéficie le blogueur. « Ce qui m’insupporte, c’est qu’on lui donne autant de lumière, qu’il passe dans TPMP en position de victime », explique ainsi Andréa, faisant référence à cette séquence où il avait quitté le plateau en larmes après avoir raconté une agression qu’il avait subie. Récemment, Aqababe s’est aussi exprimé dans Libération, où il a accusé le rappeur Maes de l’avoir kidnappé et violenté en 2019.
Si la procédure devrait regrouper pour l’instant 4 plaintes seulement, le collectif Avi précise avoir reçu bien plus de témoignages de victimes présumées. Mais beaucoup n’ont finalement pas souhaité porter leur dossier devant la justice. « Il y a une vraie crainte autour des influenceurs, les victimes se sentent intimidées, explique Helena, membre de l’association. Nous espérons qu’avec ces dépôts de plainte, d’autres oseront se rapprocher de nous. » Le collectif est accompagné dans cette procédure par Raphaël Molina du cabinet Influxio Avocats, spécialisé dans ce type de dossiers. « Il y a un vrai double jeu sur la pratique de l’influence commerciale, sur la vente d’exposition », regrette le conseil auprès de l’Informé. Quant aux victimes, elles l’assurent : on ne les y reprendra plus. « Cette erreur m’a servi de leçon, fulmine Andréa. J’espère qu’il tombera. »
Nous avons tenté de joindre à plusieurs reprises Aqababe via l’email professionnel présenté dans sa biographie Instagram. Sans succès.
*Prénoms d’emprunts