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Continuer la lectureChristophe Dechavanne gagne la guerre des capotes
L’animateur star, qui défendait bec et ongles son célèbre slogan « Sortez couverts ! » face à un labo qui voulait l‘exploiter, se réjouit que la justice lui donne aujourd’hui raison.
« Sortez couvert ». La phrase est devenue culte. Pendant plus de trente ans, Christophe Dechavanne a conclu chacune de ses émissions de télé par ces quelques mots. Un conseil avisé qui s’est étonnement retrouvé au cœur d’un long bras de fer judiciaire. En 2018, les laboratoires Majorelle ont voulu déposer la marque « Sortez couverts ! » pour l’adosser à leurs préservatifs. La différence avec la signature déposée par Dechavanne quinze ans plus tôt ? Une lettre et un point d’exclamation. « Au départ, j’ai pensé que c’était une erreur, confie l’animateur à L’Informé. Puis je me suis rendu compte que leur but était vraiment de s’emparer du slogan ». Appréciant peu la démarche, la star du petit écran a saisi la justice et, après moult rebondissements procéduraux, la cour d’appel de Paris vient de lui donner raison : le 5 octobre dernier, la société pharmaceutique a été condamnée pour ce dépôt « frauduleux ». Elle l’avait déjà été en première instance.
Rembobinons. En 2003, Dechavanne fait de son expression fétiche une marque, « Sortez couvert », qu’il dépose, via sa société de production Coyote Conseil, auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI). Détail qui va prendre toute son importance, cette propriété concerne les émissions de télé, radio, les spectacles et autres services culturels… mais pas les capotes. En 2018, les laboratoires Majorelle s’engouffrent dans la brèche et déposent à leur tour une marque quasi identique mais destinée, cette fois-ci, aux préservatifs. Ils revendiquent aussi une myriade de noms de domaine reprenant le slogan culte sous toutes les formes possibles et imaginables. Furieuse, Coyote Conseil s’oppose à ce dépôt et tente de rattraper le coup en élargissant le spectre des produits visés par sa marque initiale. Sans succès. Dechavanne décide alors de porter l’imbroglio devant les tribunaux, en juillet 2019. « Il n’était pas question d’être dépossédé de ce slogan, de cette cause pour laquelle je me bats », lance-t-il.
La petite phrase est en effet loin d’être une simple boutade pour notre vedette. Très tôt dans sa carrière, l’animateur s’est engagé dans la lutte contre le sida, une cause chère à ses yeux. Premier présentateur du Sidaction, en 1994, il a aussi multiplié les campagnes avec le labo Polidis pour commercialiser des « capotes » pas chères. En 2019, leur préservatif « Sortez couverts ! » s’est même vu remboursé par la sécu. « En vingt ans, on a fabriqué 60 millions de capotes avec le laboratoire Polidis, on a posé des milliers de distributeurs dans les lycées, plutôt à perte qu’à gain. Voir tout à coup un laboratoire s’approprier cette marque quasi humanitaire pour faire un produit commercial, c’était dément », explique le présentateur.
Ces quelques mots sont « pour lui le symbole de son investissement », abonde son avocate, Me Annette Sion. Avant d’ajouter : « Ces années de militantisme bénévole allaient profiter au business d’une société commerciale alors que Polidis vendait ses capotes à prix coûtant et sans gagner un centime. » Au cours de la procédure, les laboratoires Majorelle ont réfuté une quelconque intention de profiter de la notoriété de Dechavanne ou de nuire à leur concurrent. L’entreprise a au contraire plaidé sa bonne foi en estimant que « la locution est connue comme un slogan de prévention mais non comme une marque ».
La cour d’appel a tranché et estimé que la médiatisation des campagnes parrainées par le présentateur était telle que « la société Majorelle ne pouvait ignorer l’usage antérieur du signe « Sortez couverts ! » [...] pour la promotion de préservatifs ». Ils sont donc condamnés à verser 10 000 euros à l’animateur ainsi qu’à la société Polidis. Un pourvoi en cassation est encore possible pour les laboratoires Majorelle, qui ont refusé de répondre à nos questions et de nous indiquer s’ils l’envisageaient. Pour l’heure donc, Christophe Dechavanne remporte la guerre des capotes, juste après avoir lancé l’émission Quelle époque ! qu’il co-anime avec Léa Salamé. Et dans le programme, il se tient à son crédo : « La lutte contre le sida a été mon combat, elle l’est et le sera toujours. Tous les samedis soir, je continue de dire « faites les fous, cassez les meubles mais sortez couvert ! »
