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Continuer la lectureL’aventure de Bolloré dans les télécoms tourne au fiasco
Le milliardaire avait misé gros sur la technologie Wimax, une sorte de super Wi-Fi. Dix-sept ans plus tard, sa filiale télécom ne vaut plus rien.

Elle devait révolutionner l’internet mobile : la technologie Wimax, une version améliorée du Wi-Fi, promettait davantage de débit sur une zone de couverture bien plus large, avec un niveau de sécurité bien plus élevé. Enthousiaste, le groupe Bolloré avait créé Bolloré Telecom en 2005 pour pousser cette innovation, obtenant rapidement 12 licences régionales pour déployer les réseaux, et même 10 de plus par la suite. Mais aujourd’hui, la filiale ne répond plus. Dirigée par Cyrille (le benjamin des trois fils de Vincent), elle a rendu toutes ses fréquences à l’Arcep, le gendarme des télécommunications, a constaté l’Informé. « Les autorisations d’utilisation ont été abrogées à la demande de Bolloré », confirme l’Autorité. Il faut dire que les pertes se sont accumulées : au moins 150 millions d’euros depuis 2005. Quant à la valeur de cette filiale dans les comptes du groupe Bolloré, elle est passée progressivement de 159 millions d’euros à … 0 l’an dernier. Avec seulement deux salariés, la fermeture de l’entreprise semble désormais inéluctable.
La fin d’un long chemin de croix pour l’industriel breton. Au départ, le fabricant de microprocesseurs, Intel, promettait pourtant d’équiper tous les PC et smartphones de puces adéquats pour recevoir ce signal comme il l’avait fait pour démocratiser le Wi-Fi.

Les opérateurs y croient… sauf qu’Intel ne passera jamais à l’acte. D’un usage espéré massif, cette technologie ne sert finalement qu’à des cas particuliers pour amener Internet haut débit dans des certaines régions peu connectées par exemple mais aussi dans des ports ou des aéroports. Les déploiements prennent de plus en plus de retard au point que l’Arcep tape du poing sur la table en 2011 et adresse une mise en demeure à plusieurs opérateurs dont Bolloré Telecom. Ce dernier installe finalement 6 000 stations à la fin 2017. Lui qui a dépensé 200 millions d’euros cherche une porte de sortie en tentant d’utiliser ses fréquences pour faire de la 4G, sans succès, puis retente sa chance plus récemment avec la 5G. Là encore, il se heurte à un mur : les licences interdisent un usage en mobilité. Concrètement, un utilisateur doit être déconnecté lorsqu’il passe d’une antenne à une autre comme avec le Wi-Fi.
Faute de débouchés, la société voit alors son chiffre d’affaires - déjà pas bien lourd - s’effondrer de plus de 93 % en l’espace de onze ans passant de 2,36 millions d’euros en 2011 à seulement 147 000 euros l’an dernier. Cette chute s’explique, en partie, par la cession de ses parts dans Wifirst en 2019, un spécialiste des réseaux Wi-Fi dans les hôtels, les campings, les Ehpads, les centres commerciaux… Et l’accélération du déploiement de la 4G puis de la 5G sur tout le territoire, sans compter l’arrivée d’Internet par satellites avec Starlink, ne laissent guère de place au Wimax.
Bolloré Telecom pouvait encore conserver les licences jusqu’en 2026 mais il a donc décidé de jeter l’éponge avant. Interrogée, la société n’a pas souhaité faire de commentaires.