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Continuer la lectureSociety, So Foot… comment Franck Annese s’est embrouillé avec ses deux associés. Partie 1
Guillaume Bonamy et Sylvain Hervé vont quitter leur ami de 20 ans. Ils l’accusent d’avoir manqué de transparence dans la gestion du groupe So Press. Premier volet de notre enquête sur cette guerre interne.

Après Society, So Foot et So Film, le prochain magazine du groupe So Press à un titre tout trouvé : So Drama. Car c’est bien cela qui se joue chez cet éditeur, très apprécié des jeunes de 20 à 30 ans, tant les relations entre les trois fondateurs se sont tendues ces derniers mois. Associés depuis 2003, Guillaume Bonamy et Sylvain Hervé d’un côté et Franck Annese de l’autre, sont en train de se séparer après un long conflit, a appris l’Informé. Signe de cette rupture définitive, leurs noms ont disparu de la liste des principaux actionnaires mentionnés dans chaque numéro de Society (l’ours), et ce depuis le 28 septembre dernier. Le titre de cette édition - « Marre des « amis » au bureau ? » - était-il un message subliminal du célèbre journaliste à casquette à l’adresse de ses anciens potes ? Toujours est-il que seuls apparaissent désormais le producteur télé Pierre-Antoine Capton, le footballeur Edouard Cissé, l’ex-patron de Système U, Serge Papin, ou encore l’ancien président du PSG, Robin Leproux.
Contacté, le duo explique à l’Informé être « soumis à un accord de confidentialité très strict dont le non-respect pourrait remettre en cause certaines opérations en cours ». Et pour cause. Selon nos informations, Guillaume Bonamy et Sylvain Hervé vont toucher un chèque d’un million d’euros chacun en échange du rachat de leur participation dans So Press (un peu plus de 46 % au total). Une jolie somme au regard des 150 euros investis en 2003 et qui valorise le groupe aujourd’hui à un peu plus de 4 millions d’euros. Ce montant sera directement payé par la société. De quoi inquiéter certains salariés pour la suite, la maison n’étant déjà pas réputée pour très bien payer ses journalistes.

Cette transaction met un terme à une bataille acharnée débutée il y a plus de trois ans entre Franck Annese et ses deux acolytes, rencontrés au début des années 2000 à l’Essec. Depuis la création de So Press, Guillaume Bonamy et Sylvain Hervé n’ont jamais été réellement impliqués dans les affaires courantes. Le premier fait carrière dans l’audit interne chez Allianz, et le second dirige la start-up Decide.AI. Ils demandaient depuis 2019 au patron de So Press de trouver un nouvel investisseur aux reins suffisamment solides pour racheter leurs parts. Franck Annese n’était pas contre leur départ, y voyant l’opportunité de récupérer leurs actions pour récompenser certains salariés de leur fidélité. C’est sur le prix de cession que la brouille est née : jusqu’à l’accord obtenu ces derniers jours, toutes les offres financières ont été jugées insuffisantes.
Vikash Dhorasoo se met hors jeu de So Press
L’ex international de l’équipe de France de football, Vikash Dhorasoo, n’apparaît plus parmi les principaux actionnaires du groupe So Press depuis le 15 septembre 2022. Le consultant sportif à l’Équipe TV avait investi 98 200 euros en 2015 dans l’éditeur, année du lancement du magazine Society. Il a finalement revendu ses parts, avec une jolie plus-value à la clef de l’ordre de 50 000 euros, à François Saugier, ancien vice-président de la place de marché d’Amazon en Europe. Ce dernier, éditeur au Seuil dans les années 1990, avait participé à l’aventure 00h00, l’une des premières boutiques en ligne de téléchargement de livres en 2000, revendue au fabricant de liseuses électroniques Gemstar.
Faute de deal, le duo s’est mis à faire de l’obstruction, et a refusé de valider les comptes sociaux 2021 et 2022 de So Press. Première raison invoquée : le manque d’informations financières. Bien sûr, comme chaque actionnaire, tous deux ont eu accès aux résultats de la maison mère. Ils savent ainsi que le groupe So Press est tombé dans le rouge en 2020 en raison de la crise du Covid, avec une perte de 224 802 euros selon les comptes sociaux, c’est à dire hors filiales. Mais il est légèrement repassé dans le vert depuis, avec un bénéfice de 48 527 euros en 2021 et de 9 928 euros en 2022. Insuffisant pour Bonamy et Hervé qui accusaient le management d’être avare de détails sur le reste, et de ne pas avoir de vision d’ensemble des chiffres du groupe. Il faut dire que So Press est composé d’une myriade d’entreprises enchevêtrées et placées sous la houlette du vibrionnant président Franck Annese. Multi casquettes, il est tour à tour producteur de musique avec son label Vietnam (qui édite le groupe Emprs dont il est le guitariste), publicitaire avec All So, producteur de fictions et de documentaires avec So In Love… le quadragénaire multiplie les initiatives dans lesquelles So Press est actionnaire majoritaire ou minoritaire en fonction des cas (Éditions Nantaises, Derby Digital…). La société assure avoir donné accès à l’ensemble des éléments à tous les actionnaires.
Les deux cofondateurs ont aussi réclamé la liste de toutes les filiales, le détail de leurs comptes, et les résultats précis de chacun des magazines avec leur nombre d’abonnés (Society, So Foot…) ainsi que ceux des activités hors presse. Concernant les performances des titres de presse, ces chiffres sont impossibles à fournir, répond Franck Annese à l’Informé : « Tous les journalistes travaillent pour différents titres selon leurs envies, et il n’existe pas de comptes dédiés pour chaque titre ».
Et ce n’est pas tout. Dans un souci de simplification de la structure, le duo poussait à une fusion de toutes ces sociétés pour les regrouper avec So Press. L’ensemble afficherait un chiffre d’affaires consolidé d’environ 25 millions d’euros par an, selon les Échos (la moitié dans la presse et l’autre grâce à la production de publicité notamment) et serait rentable grâce aux activités hors presse.
Enfin, la dispute entre les trois anciens comparses s’est cristallisée sur l’achat de l’immeuble dans lequel les magazines du groupe ont emménagé en 2020. Une affaire dans l’affaire à découvrir ce jeudi dans le deuxième volet de notre enquête.
Les ventes de So Foot en forte hausse, celles de Society s’écroulent
Les titres du groupe So Press connaissent des fortunes très diverses. Sur la période juin 2022 - juin 2023, la diffusion en kiosque de Society s’est écroulée de 20 % et ses abonnements de 21 %. À l’inverse, celle de So Foot a largement profité de la Coupe du Monde au Qatar avec des ventes en kiosque en progression de 16,8 %, à 10 300 lecteurs en moyenne, et des abonnements en progression de 9 %, soit 10 200 fidèles.
Article actualisé le mercredi 22 novembre sur l’origine des fonds qui financeront le rachat des parts des Guillaume Bonamy et Sylvain Hervé.