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Continuer la lectureLes journalistes de Capital devront intervenir sur Europe 1 et CNews… ou partir
Le nouveau vice-président du groupe Prisma Media, Gérald-Brice Viret, a détaillé les synergies attendues entre les rédactions audiovisuelles et celles du magazine économique. Les élus envisagent de dénoncer le plan social en cours.

Premier comité social chargé pour Gérald-Brice Viret. Le directeur général de Canal+ France, nommé fin août vice-président de Prisma Media, a rencontré pour la première fois les élus du premier groupe de magazines en France ce mardi 16 septembre. Lors de cette réunion, ce proche de Vincent Bolloré a présenté comme une chance le rapprochement des équipes de Capital et de Harvard Business Review avec celles d’Europe 1 et de CNews. Un déménagement est prévu d’ici à la fin de l’année au plus tard : ces rédactions quitteront Gennevilliers (Hauts-de-Seine) pour rejoindre les locaux de la radio, de la chaîne info et du Journal du Dimanche, situés dans le 15e arrondissement de Paris, comme l’a révélé l’Informé. Un expert va être nommé par le CSE à ce sujet afin de retarder le processus d’information consultation.
Au cours de la réunion, le nouveau dirigeant a notamment annoncé la mise en avant de la marque Capital sur les autres médias de la maison, les journalistes du titre étant invités à apporter leur expertise économique à Europe 1 mais aussi à CNews. La possibilité d’une chronique a même été évoquée. Et pour les récalcitrants ? « Je suis pour que les salariés soient heureux de travailler dans le groupe. Et si ce n’est pas le cas, c’est dommage, mais ils peuvent partir », a-t-il précisé. Avant de conclure « n’être d’accord sur rien » avec les élus et que la suite se jouera entre avocats. Une méthode déjà éprouvée lors de la reprise en main de iTélé en 2016 (devenu CNews), d’Europe 1 en 2021 et du Journal du Dimanche en 2023. En désaccord avec les nouvelles orientations idéologiques de leur employeur, la grande majorité des salariés avaient plié bagage.
La question est de savoir si les journalistes de Prisma refusant le déménagement et les synergies pourraient venir grossir les rangs du plan social en cours qui vise 54 postes. Sur la base du volontariat depuis le 18 août, ce plan basculera sur des départs contraints à partir du 10 octobre si le nombre de partants n’a pas été atteint. Le sujet de l’élargissement et des conditions de ce PSE ont été abordés avec les élus du personnel. Pour mettre la pression sur la direction, ils ont voté une délibération pour pouvoir contester en justice le plan social. Selon eux, la direction leur a caché ce déménagement, ainsi que le rachat en cours d’Ici Paris et France Dimanche (aujourd’hui propriété de CMI France) avec l’arrivée d’une trentaine de journalistes supplémentaires. « La direction n’a pas été de bonne foi lors des négociations bouclées cet été », explique Emmanuel Vire, délégué syndical SNJ-CGT chez Prisma.
Afin de donner davantage de détails sur la suite, Serge Nedjar, directeur général de CNews, récemment bombardé directeur des rédactions Femme, TV, Ludique, Découverte et Économique, va rencontrer la rédaction de Capital ce jeudi 18 septembre.
L’arrivée des Bolloré Boys chez Prisma ajoute à l’inquiétude. Avec Gérald-Brice Viret et Serge Nedjar, le cost killer Michel Sibony, « chief value officer » de Vivendi depuis 2016, a été nommé membre du comité exécutif et vice-président chargé des achats et de la performance. Le nouveau trio, déjà surnommé en interne les Dalton, s’est voulu rassurant « avant de sortir les flingues », ironise un journaliste.
Ce triumvirat débarque après le départ fin août de Claire Léost qui a surpris les salariés. Mais un connaisseur du secteur tempère : « elle était sur la sellette suite aux mauvais résultats de Prisma. Elle ne serait pas restée en place longtemps si elle n’avait pas pris les devants en partant ». En effet, les comptes de l’éditeur ne cessent de se dégrader. Le chiffre d’affaires a chuté de -5,4 % l’an dernier. Et le recul continue au premier semestre de cette année (-2 %). Surtout, la marge opérationnelle ajustée (Ebita) est tombée de 9 %-10 % ces dernières années à seulement 2 % au 1er semestre 2025. Beaucoup se demandent donc si Vincent Bolloré, déçu par les résultats de ses magazines (achetés en 2021 pour 224 millions d’euros), ne voudra pas s’en séparer, au moins partiellement. Certains évoquent une cession des titres féminins (Femme actuelle). Tandis que la Lettre mentionne un intérêt de Bernard Arnault pour le mensuel économique Capital.
En attendant, d’autres synergies sont mises en œuvre. Le prochain CSE mentionne la prise en charge par la régie publicitaire de Prisma du JDNews et du JDMag, les deux suppléments magazines du JDD. Depuis l’arrivée de Geoffroy Lejeune en 2023, les annonceurs ont déserté les pages du journal. Les recettes brutes se sont écroulées de 46,3 à 29,5 millions d’euros entre 2022, avant son arrivée, et 2024, selon les données de Kantar. Soit une baisse de 63 % et ce malgré le lancement du JDNews, qui a engrangé 7 millions d’euros bruts l’an dernier. La campagne de boycott lancée par les Sleeping Giants a pu jouer. Ce collectif d’activistes s’est mis à interpeller les annonceurs sur les réseaux sociaux.
Interrogée, la direction de Prisma n’a pas souhaité faire de commentaire.