L'abonnement à l'Informé est à usage individuel
Un autre appareil utilise actuellement votre compte
Continuer la lectureCette procédure pourrait rapporter une belle indemnité aux abonnés Spotify et Deezer
L’association de consommateurs CLCV envisage de réclamer une indemnisation pour les possesseurs d’iPhone abonnés à Spotify ou Deezer. Ils ont pu être surfacturés en raison de pratiques abusives d’Apple.

L’appel à témoignages est passé un peu inaperçu. Depuis mi-février, l’association de consommateurs CLCV (Consommation, logement et cadre de vie) invite les utilisateurs d’iPhone à la contacter s’ils sont abonnés à un service de musique autre que celui d’Apple : Spotify, Deezer, Youtube Music, Amazon Music… Motif : ils ont peut-être payé trop cher leur abonnement. Cet appel est la première pierre d’une action de grande ampleur qui pourrait conduire l’association, bien qu’elle n’en dise rien à ce stade, à réclamer plusieurs millions d’euros à Apple en France.
La CLCV se place dans le sillage de la condamnation d’Apple par la Commission européenne pour abus de position dominante, en mars 2024. Dans le viseur de Bruxelles : les règles de l’App Store, par lesquelles Apple interdit aux services musicaux d’informer leurs utilisateurs qu’ils pourraient payer moins cher leur abonnement en-dehors de l’application, en allant directement sur le site du prestataire notamment. Dans l’appli, les offres sont en effet plus chères en raison de la commission de 30% imposée par la firme à la pomme. Apple aurait ainsi indirectement favorisé son propre service de musique au détriment des concurrents.

Les pratiques illégales s’étant étalées sur dix ans (de 2015 à 2024), la Commission a fixé une amende XXL, de 1,8 milliard d’euros. La sanction ouvre aussi la voie à des demandes de dommages et intérêts. « Notre action vise à réclamer une indemnisation du préjudice des consommateurs », confirme François Carlier, délégué général de la CLCV. Il estime à « au moins 100 000 » le nombre de Français potentiellement concernés par ces surfacturations des services de musique sur iPhone.
Cet automne, des actions similaires contre Apple ont été lancées dans plusieurs autres pays européens, sous l’impulsion d’associations locales comme Test-Achats en Belgique, Altroconsumo en Italie et OCU en Espagne. Elles estiment le surcoût payé par les possesseurs d’iPhone entre 1,5 et 3 € pour chaque mois d’abonnement au service de musique. OCU mentionne un préjudice moyen de 109 € par abonné Spotify. Avec le nombre de victimes, les calculatrices s’affolent. Au global, le groupement Euroconsumers, auquel appartiennent ces trois associations, évalue les profits abusifs d’Apple à 259 millions d’euros à l’échelle de l’Europe, dont 6,7 millions en Belgique et un peu plus de 25 millions en Italie et autant en Espagne.
Pour la France, la CLCV ne donne pas de chiffres, pas plus que de précisions sur la forme et les prochaines étapes de ses démarches. Le choix d’une action de groupe est probable – c’est le type de procédure utilisé par les homologues de la CLCV dans les pays voisins. Ce dispositif permet de regrouper les victimes d’un même abus dans une procédure unique, notamment quand le préjudice subi par chacun est trop faible pour justifier des poursuites à titre individuel.
En France, dans ce type d’action, le tribunal examine la responsabilité de la société en cause à partir de quelques cas-témoins présentés par l’association de consommateurs. Ce n’est qu’à l’issue de la procédure que les autres victimes ont à se manifester pour être indemnisées si le succès est au rendez-vous !
De nombreuses incertitudes pèsent toutefois sur la démarche. A commencer par les contestations véhémentes d’Apple. La firme, qui n’a pas répondu aux sollicitations de L’Informé, a fait appel de l’amende infligée par la Commission européenne. L’an dernier, elle déplorait une condamnation décidée « malgré l’échec de la Commission à mettre à jour des preuves crédibles de préjudice causé aux consommateurs ». Elle fustigeait aussi l’activisme de Spotify pour alimenter le dossier, malgré sa domination sur le marché de la musique en ligne.
Si la condamnation d’Apple est confirmée, la potentielle action de groupe en France peut aussi prendre des années – le volet judiciaire européen et le volet français peuvent toutefois avancer simultanément. Une chose est sûre : pour espérer être indemnisé, les consommateurs concernés doivent conserver précieusement leurs justificatifs d’abonnement (preuves de paiement, contrat…) pour pouvoir les produire le moment venu.