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Continuer la lectureArthur, Catherine Jacob, Claudia Tagbo… drôle d’embrouille derrière la série R.I.P. de TF1
L’humoriste a pris la place de l’actrice de La vie est un long fleuve tranquille dans cette fiction produite par une société de l’animateur. Occasionnant un long bras de fer judiciaire.

Faire rire même dans les moments les plus difficiles, c’était le pari de la série « R.I.P. Aimons-nous vivants ! », diffusée sur TF1 en juillet 2024. L’humoriste et actrice Claudia Tagbo y joue une mère célibataire contrainte de reprendre une société de pompes funèbres. Mais la série, produite par Alef Two, la société de l’animateur Arthur, n’a pas fait rire tout le monde. Et certainement pas celle qui avait accepté d’incarner le personnage principal avant l’arrivée de Claudia Tagbo : la comédienne Catherine Jacob. Elle a saisi la justice pour s’opposer à ce qu’elle considère comme une rupture abusive de son contrat dans des conditions « brutales et vexatoires ».
Les faits remontent à 2023. Arthur et Nora Melhli (associés depuis 2018 pour produire fictions et documentaires) décident de faire équipe avec Varante Soudjian et Thomas Pone, un duo à l’origine de plusieurs films et séries. Soudjian est un réalisateur de comédies à succès : Inséparables, la Traversée... Tandis que Pone est un scénariste controversé : il a été plusieurs années durant un proche d’Alain Soral. Pone a ensuite affirmé qu’en réalité, il espionnait l’idéologue d’extrême droite, mais la véracité de son récit a été mise en question en raison de nombreuses incohérences.

Le quatuor crée une société baptisée Alef Two, détenue à 10 % par Varante Soudjian et 50 % par Alef One (filiale commune d’Arthur et Nora Melhli). Leur premier projet est donc une série télévisée baptisée R. I. P. Pour le rôle principal, ils approchent Catherine Jacob, césar du meilleur espoir féminin en 1989 pour son rôle de Marie-Thérèse dans « La vie est un long fleuve tranquille », qui alterne alors entre des premiers rôles au théâtre et des apparitions dans des films ou séries télévisées. Elle a notamment joué, entre juin 2021 et janvier 2023, dans quelques épisodes du feuilleton à succès « Demain nous appartient », diffusé sur TF1 depuis 2017. Après plusieurs échanges avec Alef Two, Catherine Jacob accepte le rôle. Les discussions se poursuivent pour établir les modalités de cette nouvelle collaboration.
Mais un différend éclate entre la comédienne et la société audiovisuelle, aux raisons floues mais dont chacun se renvoie la responsabilité. La production jette alors son dévolu sur Claudia Tagbo, une vieille connaissance d’Arthur. De 2010 à 2013, elle a été l’une des chroniqueuses de son émission hebdomadaire « Ce soir avec Arthur ». Ses spectacles « Crazy » (2011) et « Lucky » (2017) étaient quant à eux produits par Satisfaction, l’entreprise fondée par l’animateur en 2010.
En juin 2023, Claudia Tagbo annonce quitter la série « Le crime lui va si bien » sur France 2 et commencer un nouveau projet sur TF1 : la série R.I.P. « J’ai fait un petit coucou à tout le monde en disant que j’étais libre et là il y a eu un truc qui est tombé sur la table, racontait l’actrice sur France Inter. J’ai regardé et j’ai fait : « Waouh, ça c’est drôle ! » Et c’est TF1, voilà, on y va ».
Face à ce retournement de situation, Catherine Jacob saisit le conseil des prud’hommes de Paris. Elle estimait avoir topé avec Alef Two pour 13 cachets à 4 000 euros bruts par jour de tournage, soit 52 000 euros au total, et que cet accord constituait de facto un contrat de travail, qui avait été « rompu de manière abusive par l’employeur ». Elle réclamait donc 60 000 euros de dommages et intérêts pour son préjudice matériel, 30 000 pour son préjudice moral, plus 5 000 euros de frais de procédure. En face, la société de production expliquait qu’aucun contrat de travail n’avait été signé et que la comédienne aurait donc dû saisir le tribunal judiciaire et non les prud’hommes. Dans l’hypothèse où le conseil aurait reconnu l’existence d’un contrat, le producteur estimait que sa rupture était du fait de la comédienne. Il demandait donc 30 000 euros en réparation de la « rupture abusive par Mme Jacob de son contrat de travail », ainsi que 5 000 euros de frais de procédure.
Le 8 octobre 2024, les prud’hommes ont constaté que Catherine Jacob n’apportait aucune preuve de l’existence d’un contrat et ont renvoyé l’affaire devant le tribunal judiciaire de Paris. « Si Catherine Jacob et Alef Two ont bien échangé sur un projet de collaboration, aucun contrat de travail n’a été signé. En conséquence, il n’y a pas de contrat de travail », indique le jugement. Catherine Jacob a d’abord fait appel de cette décision, avant de l’accepter et de se résoudre à passer par le tribunal judiciaire. Le 23 juin 2025, elle a finalement abandonné toutes les poursuites.
Diffusés en juillet 2024, les deux épisodes pilotes de « R.I.P. Aimons-nous vivants ! » ont attiré 3,58 millions de téléspectateurs, pour une part d’audience de 21,8 % sur les 4 ans et plus, et 24,4 % auprès des femmes responsables des achats (FRDA-50) de moins de 50 ans. Une saison 2 était en tournage au printemps 2025, mais aucune date de diffusion n’a été rendue publique pour l’instant.
Avec moins de succès, Alef Two a aussi produit un film, Challenger, réalisé par Varante Soudjian et écrit par Soudjian et Thomas Pone. Son budget, de 6,5 millions d’euros, a été apporté par Alef Two (2,2 millions), Netflix (1,8 million), France 2 (1,1 million), UGC (540 000 euros) et les régions Île-de-France et Hauts-de-France (400 000 et 100 000 euros). Sorti en salles le 23 octobre 2024, le film a fait 286 016 entrées selon JP Box Office.
Me Vincent Toledano et Me François Pouget, les avocats de Catherine Jacob et de la société Alef Two, n’ont pas répondu à nos sollicitations. La porte-parole d’Arthur n’a pas donné suite, Nora Melhli n’a pas souhaité faire de commentaires.